Quelques digressions sur les Iles au vent " Barlavento", avant de partir demain vers les iles sous le vent "Sotavento"
Les petites joies, les grands moments,les petits désagréments, ... sans aucun ordre comme d'hab !
Santa Luzia la déserte et cruelle, Yves le regrette encore, on n'a pas débarqué. C'était un pèlerinage à ne pas rater, une belle escale d'il y a 38 ans. On était deux bateaux, Shieldaig et Drac (qui partait pour son deuxième tour du monde avec X et Y - j'ai oublié les prénoms - des vieux de 55 ans au moins). C'était notre première partie de pêche sous-marine, je n'avais rien pris, mais c'était excitant, on avait fait une magnifique balade sur la plage au vent, encombrée - c'est peu de le dire - de filets, de bouées en verre, de bois flottés, de trésors divers et variés. Bon mais cette fois on n'est pas allé à terre: on était tout seul au mouillage, il y avait des rafales peu sympathiques, la chaine raguait sur des cailloux épars, Christine n'était pas motivée (litote ?), Etoile (un cata rencontré à Mindelo - voir plus loin) s'était retourné avec son annexe en arrivant sur la plage.... On est resté au bateau et on est reparti au petit matin vers Sao Nicolau
Boa Vista, un morceau de Sahara perdu dans l'Atlantique, disent-ils dans les livres et c'est vrai. L'ile est plate avec quelques pitons qui n'atteignent pas 300 mètres, une misère pour toutes ces iles de l'Atlantique. Il y a d'immenses (enfin bon suffisamment grands pour qu'on en voit pas le bout mais on rappellera que, quand on est debout avec des yeux à 1m 50 du sol, l'horizon n'est qu'à 5 km)... je disais donc d'immenses déserts de cailloux, des dunes de sable comme en Mauritanie, des oasis avec leur palmiers et des chèvres, en veux-tu en voilà comme dans tout désert qui se respecte. Et nous, en bon touriste acceptant ses contradictions, on a loué un quad et on est allé traverser tout ça sur cet engin qui passe partout partout, tout heureux de revivre un peu les virées dans le désert d'il y a quelques années.
On est hors saison, les bateaux voyageurs sont encore aux Canaries, les Alizés ne sont pas encore bien établis, il peut pleuvoir. D'ailleurs il pleut aujourd'hui. C'est en Novembre que les Iles du Cap-Vet sont prises d'assaut (l'ARC y passe avec une cinquantaine de bateaux inscrits). Donc il y a peu de bateaux et c'est pas qu'on n'ait rien à se dire tous les deux mais on regrette un peu de ne pas avoir de compagnie pour l'apéro, pour les balades, pour refaire le tour du monde. Bon, il y a quand même eu Bob et Françoise sur le Cata Etoile, qui partent faire le tour par le Cap-Horn sur un bateau à leur mesure, sans voiles, que Bob a laissées au ponton après ses routes du Rhum et ses Figaro. Jo et Jenny les franco-anglais sur Arkel, minimalistes et végétaliens et voileux un peu intégristes sur leur petit bateau de 9 mètres. Laurent et Shu Yin les franco-chinois qui partent vers Ushuaia mais on a finalement plus communiqué par Whatsapp que dans un cockpit. Okeanos avec Claude le belge, aventurier s'il en est encore qui s'est installé ici il y a 20 ans. Mais son bateau pourrit dans le port de Boa Vista, il est à prendre ou à couler .....
Les balades à pied, alors là c'était royal. Il y a eu celle au phare de San Pedro, au sud de Mindelo sur un chemin si vertigineux qu'Yves n'a pas desserré les dents de tout l'aller-retour mais que c'était beau ce sentier de 50 cm qui serpente le long de la falaise entre 0 et 100 mètres au-dessus de la mer toute verte.
Il y a eu les deux magnifiques randonnées à Santo Antao avec Pascale, deux fois 5 heures de marche sur des chemins muletiers pavés (j'en ai compté 40 000 000) datant du siècle d'avant le dernier avec des villages perchés dans la montagne. C'est peut-être comme ça le Népal sauf qu'il n'y a pas la mer.
Il y a eu celles de Sao Nicolau, pour l'une on avait pris les services de Nadi, un guide local et on a bien fait car le sentier avait disparu par endroit suite au cyclone (on dit furacao en portugais, ça sonne comme furoncle) Fred. Cette traversée du Monte Gordo avec redescente sur la mer était extraordinaire.
Evidemment , les lendemains et les surlendemains étaient un peu difficiles.
Le poisson est omniprésent au Cap-Vert : Garoupa, Atum, Serra, Dourado on aura compris Mérou, Thon, Barracuda, Dorade. Les pêcheurs partent dans la nuit (et nous réveillent par la même occasion) et reviennent au petit matin. C'est très organisé, les pêcheurs (que des hommes) pèsent des bassines de poissons et les vendent aux poissonniers (que des femmes) qui les revendent au détail avec un bénéfice royal de un demi-euro le kilo. Et même il y en a des poissonnières qui partent avec leur bassine sur la tête sur les sentiers pavés dont on a déjà parlé pour aller vendre leur poisson dans les villages reculés qui n'ont pas d'accès en voiture.
Le poisson donc on l'achète souvent, on le pêche un peu. On s'est essayé à la pêche sous-marine, pas brillant avec quelques petits poissons pas savoureux du tout. Avec Francelinho on s'est essayé à la pêche à la traine et là on a enfin pris une belle coryphène. Et toujours avec Francelinho on s'est essayé à la pêche à la palangrotte et cela a donné trois petits rougets excellents.
Le poisson, on l'a donc et on le fait cuire.
On l'aime bien cru ou plutôt cuit dans du jus de citron vert avec une bonne lampée de lait de coco. Dans une autre vie, on allait chercher la noix de coco au pied de l'arbre (on n'essayera pas de faire croire qu'on y montait), on ouvrait notre
noix (50 coups de machettes au moins conte trois ou quatre pour les autochtones), on râpait notre noix de coco (râpe en forme d'éperon de cavalier fixée au bout d'une planchette sur laquelle on s'assoit)... Maintenant on ouvre une mini-brique de lait de coco pasteurisé, c'est finalement aussi bon.
On l'aime bien aussi coupé en fines lamelles et juste poêlé quelques secondes et arrosé de sauce soja plus oignons.
Et on est devenu fan des acras (recette antillaise by Vic & Sarah) qu'on vous livre telle quelle.
Les autochtones sont très sympas et suivent bien leur devise "no stress". Les rapports avec eux sont faciles, plus que faciles surtout quand on parle le portugais même si finalement c'est aussi une langue étrangère pour eux. Que ce soit avec le pêcheur Francelinho, avec le guide Nadi, avec la directrice d'école Risethe, avec la couturière de Mindelo, avec les marinheiros de la marina, avec tous les chauffeurs de taxi (aluguer on dit ici) plus ou moins collectifs, avec tous les commerçants, les échanges sont cordiaux et souriants, c'est tapes sur l'épaule, "Tudo bem" à tout bout de champ, même si au bout du compte on est plutôt sur la réserve, on ne partage pas grand-chose, chacun son monde. Faut dire que c'est comme en Afrique, c'est toujours nous qui avons les cigarettes... à moins que ce soit une histoire d'âge.
Mindelo, la ville de Cesaria, musique à tous les étages le mercredi, le vendredi et le samedi, Mindelo et sa marina (quel repos d'avoir son bateau avec deux amarres et une pendille quand les bateaux au mouillage se dandinent et se tortillent sous 30 noeuds de vent), Mindelo et sa cuisinière Loutchka qui tient entre autres une guinguette au bord de l'eau où Capverdiens et quelques touristes viennent s'empiffrer de recettes, de musique et de danse locales, Mindelo l'aride, où pas grand-chose ne pousse entre les pierres, Mindelo et la tête couchée sui surveille la ville (Washington disent les physionomistes), Mindelo la torride quand le vent s'arrête (on en a au plusieurs des jours sans vent, c'est alors pénible de se réveiller le matin, pénible de se balader, pénible de tenir jusqu'à 17 heures que cela se rafraichisse un peu).
La tourista à laquelle on n'échappe pas surtout quand on ne regarde pas trop ce que l'on mange. On n'y a pas échappé. Ca vide, au figuré et au propre (si on veut !). Les anglo-saxons disent des fruits et légumes dans ces pays "peel it, cook it or forget it", mais nous on ne peut pas. Et il faut bien s'immuniser doucement ...
Les traversées entre les îles, jusqu'ici rien à redire et rien à voir avec ce qu'on a connu aux Açores (on se rappelle encore des 30 heures de moteur entre Horta et Sao Miguel avec 20 noeuds de vent pile dans le nez !). Ici on aura eu à chaque fois un vent tout à fait maniable, pas toujours dans le bon sens, faut pas rêver. L'alizé vient de l'est et Boa Vista est justement à l'est de Sao Nicolau et quand on fait le canal entre Santo Antao et Sao Vicente dans les deux sens sûr qu'on aura le courant contre une fois !
Et toujours et encore... Bricolage et Nettoyage qui sont les deux mamelles de la croisière réussie. On essaye de se tenir à notre carnet d'entretien, on bichonne les batteries, les voiles, la coque, le moteur, le vérin du safran, l'hydrogénérateur, toutes choses indispensables et on a aussi une liste de petits trucs à faire pour s'occuper s'il y a besoin. Et la liste des affaires à rapporter de France s'allonge. Mais pour le moment, pas de panne significative, on touche de l'alu pour que ça continue.